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Pétition EU Nobel Prize Cycle de conférences

Table des matières
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Vous avez dit "Bruxelles" ???

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Des élections européennes bien inquiétantes en 2014

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Une politique de communication maladroite

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L'Europe trahie par ses dirigeants

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L’union européenne survivra-t-elle en 2024 ?

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L’Union européenne n’est pas une option, mais une obligation

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L'Europe de demain, un cauchemar annoncé ?

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La maturation de la démocratie européenne

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Quand les grands pays européens s'entendent pour imposer leur loi aux petits

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Conseil européen de mars 2011 : Pour une croissance solidaire en Europe

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Vous avez dit « Bruxelles » ???

Le mot « Bruxelles » est très souvent utilisé dans les médias par facilité, en particulier par de nombreux responsables politiques.

Ce mot – qui par ailleurs désigne une ville accueillante et à taille humaine - révèle un éloignement entre les citoyens et les institutions européennes. Alors que le niveau européen s’avère de plus en plus décisif, ce mot « Bruxelles » montre que les institutions européennes sont illisibles. « Bruxelles », c’est une nébuleuse lointaine.

La Commission européenne, en charge de la gestion quotidienne de l’Union européenne, n’est pas le Parlement européen élu par les citoyens ou encore le Conseil européen. Il est néanmoins bon de savoir de quelle institution l’on parle précisément. Par exemple, le Conseil européen, composé des chefs d’Etat et de gouvernement, donne les impulsions générales et a de grandes responsabilités, notamment au plan budgétaire. Cela est très souvent oublié : le bénéfice politique des décisions positives pour les citoyens est facilement accaparé par les Etats-membres de l’Union et le tas de poussière des décisions difficiles est renvoyé aisément par ces derniers sur « les technocrates de Bruxelles » de la Commission.

Le sens de l’Europe ne va plus de soi aujourd’hui.

Je fais partie d’une génération dont l’un des arrière-grands-pères en 1870, les 2 grands-pères de 1914 à 1918 et le père, prisonnier de 1939 à 1945, ont été, hélas, impliqués dans de terribles guerres avec l’Allemagne. Grâce à la construction européenne, comme d’autres personnes de ma génération, j’ai pu échapper à de tels événements dramatiques. Et cela n’a pas de prix.

La paix ne suffit pas pour autant à donner un sens suffisant à l’Europe dans un contexte de violence économique et sociale. Une Europe plus protectrice, plus solidaire, donc plus forte, est plus que jamais une nécessité.

Pour cela, 3 pistes –parmi d’autres- me semblent essentielles :

1- Plus de pouvoirs reconnus à l’échelon européen en tant que communauté politique, notamment en matière économique, fiscale, sociale et environnementale avec, en premier lieu la lutte pour l’emploi et contre le chômage. Aucun Etat européen ne sera à lui seul une puissance suffisante dans un contexte de mondialisation. En revanche, l’Europe est incontournable et, à travers elle, les Etats européens compteront dans le monde de demain s’ils savent s’en donner les moyens.

2- Des avancées démocratiques. Il est indispensable d’accompagner des transferts de pouvoir vers l’échelon européen par des mesures démocratiques fortes. Pourquoi pas une élection directe du président de la Commission européenne par les peuples eux-mêmes ? Pourquoi pas un autre mode d’élection des parlementaires européens, que personne ne connaît aujourd’hui, entraînant plus de visibilité et de proximité avec les citoyens ? Pourquoi pas une réelle stratégie de contact avec le terrain de la part de la Commission européenne alors qu’aujourd’hui les occasions de contact direct entre les fonctionnaires européens et les citoyens sont rares? La culture du virtuel ne pourra fort heureusement jamais remplacer les relations directes entre les personnes.

3- Des ressources propres et identifiables pour l’Europe sans alourdir la somme globale de nos contributions individuelles. Ce qui serait pris en charge au plan européen viendrait en substitution à une partie des impôts payés dans le cadre national.

L’Europe peut devenir une vraie communauté de destin au service des personnes, mieux ancrée sur les réalités locales, plus conviviale, et ainsi tourner le dos à la nébuleuse « Bruxelles ». C’est notre responsabilité collective.

Jean-Michel Boullier 15/05/2014 - Publié dans les éditions d'Ouest-France, republié ici avec l'autorisation de l'auteur. 

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Des élections européennes bien inquiétantes en 2014

A la veille d'élections au parlement européen les forces anti-européennes et populistes paraissent d'après les sondages avoir le vent en poupe, à tel point qu'elles pourraient être capables de peser pour renverser le processus de construction européenne. Pour les travailleurs et les militants impliqués dans le fonctionnement du service public européen, il s'agit d'une menace immédiate et d'un défi sérieux qui doit nous conduire à analyser avec humilité et détermination les raisons de cet important mouvement d'opinion, à en identifier clairement les causes et à proposer des remèdes, avant qu'il ne soit trop tard. Et le temps presse pour éviter que les forces obscurantistes ne jettent à terre sans ménagement et sans égard pour ses vertus l'édifice européen dans sa totalité, et que la brutalité et l'arbitraire ne prospèrent sur ses ruines. En raison de son approche critique, Le présent document pourra certainement être considéré par certains, trop engoncés dans leurs petits privilèges bureaucratiques et dans la vision béate et servile de l'Europe qu'ils inspirent, et/ou obnubilés par des théories idéologiques en lieu et place de souci d'intérêts des peuples, comme un réquisitoire contre l'Europe au nom de l'intérêt égoïste des nations. Il n'en n'est rien! Bien au contraire l'auteur est un farouche partisan de la construction européenne et partisan d'une telle construction comme une façon pour les États européens d'exister en tant que force autonome et comme une étape nécessaire dans un long cheminement vers une gouvernance mondiale de l'humanité par elle-même. Mais encore faudrait-il pour cela garder démocratiquement la main, et l'Europe est en train de la perdre par manque de démocratie, mais aussi d'assertivité et de volonté de persister dans son être et dans son modèle. Eh bien mettons les choses au point: il est tout à fait possible, et même indispensable s'il on veut éviter la ruine du projet européen, d'appartenir d'une part au monde européen, d'être un militant résolu de la construction européenne, d'être un chaud partisan d'une amélioration ambitieuse des conditions de vie des classes populaires, c'est à dire d'être de gauche, et d'être partisan résolu de sanctionner sévèrement les grandes lignes de la politique européenne menée depuis une vingtaine d'années. Il est tout à fait possible et louable d'être résolument pour l'Europe et farouchement contre la politique européenne.

La faute à la crise:

Si les institutions européennes semblent donc faire actuellement l'objet d'un véritable rejet d'une part significative et croissante de l'opinion publique européenne, c'est bien entendu qu'en dépit des promesses angéliques liées à la mise en place de l'Euro, du marché unique et de son ouverture à la mondialisation, une crise économique tenace et délétère sévit en Europe. De plus il n'est pas exclu que cette crise dont l'Europe a eu depuis quelques années le triste monopole en termes de croissance, puisse constituer l'épicentre d'une crise mondiale dont les pays émergents ressentent aujourd'hui les premières turbulences. Mais chez nous en tout cas, cette crise n'est pas une abstraction chiffrée, elle est d'ores et déjà ressentie dans leur chair par nos citoyens: revenus rognés, voire amputés, explosion du chômage en particulier chez les jeunes, rigueur sur tous les budgets, austérités imposées au niveau public, au niveau des entreprises, comme au niveau des ménages, mobilité obligée, voire expatriation, parfois indispensables pour échapper à la menace du déclassement, de la pauvreté, de la misère, sans compter ceux, toujours plus nombreux qui sombrent dans ce terrifiant maelström... Avec un monde du travail sous pression croissante, pour lequel le discours officiel lancinant sur les promesses de récompenses de la compétitivité, de la flexibilité, de la "proactivité", de la mobilité, de l'adaptabilité, est en contradiction flagrante avec la brutalité des délocalisations expéditives et autres réductions drastiques de personnel et/ou de capacités de production... Avec des classes moyennes mises en lambeaux, soudain réveillées sans ménagement de la tiédeur de leur confort individualiste par la montée de la marée glaciale de la pauvreté...

Un déni de démocratie:

Un sujet de mécontentement supplémentaire, pour les citoyens européens, consiste en un sentiment profond non seulement de déficit démocratique, mais de déni pur et simple de démocratie. Car si les élections au parlement européen sont souvent l'occasion pour les électeurs d'envoyer un avertissement sans frais aux gouvernements nationaux en place, c'étaient jusqu'à présent pour les députés européens des élections sans bilan. En l'absence d'une majorité claire et d'une opposition assortie, avec un exécutif européen qui définisse une politique claire à mettre en œuvre sous l'autorité d'un seul homme désigné et surtout révocable par le parlement, comme c'est le cas pour un gouvernement national, le positionnement des députés européen est illisible car il s'éparpille suivant la diversité des propositions soumises au vote parlementaire. Par conséquent le citoyen est incapable d'estimer pour qui il doit voter s'il veut sanctionner la politique européenne, ce qui est malheureusement le cas de la plupart des citoyens européens. Or si ce droit peut paraître aux beaux esprits une simplification outrancière, il est pourtant une condition indispensable au fonctionnement d'une démocratie, son dernier carré. Un geste significatif (mais bien tardif...) dans ce sens a enfin été fait dans le cadre du traité de Lisbonne, en soumettant à compter des prochaines élections la désignation du président de la Commission Européenne et des Commissaires au vote du Parlement Européen, qui pourra aussi faire tomber la Commission en cours de mandat. Voilà qui assure un vrai débat sur le projet, mais l'autorité conférée au Président de la Commission sur ses Commissaires sera-t-elle suffisante pour assurer la cohésion démocratiquement requise pour juger le bilan? Il est permis d'en douter. Bref, jusqu'à présent la bureaucratie a ainsi prospéré à l'abri des électeurs avec son cortège de mesurettes trop complexes proposées par de hauts fonctionnaires souvent pleins de bonnes intentions, mais surtout soumis à la pression incessante des lobbys plutôt qu'à l'épée de Damoclès d'une sanction démocratique sur la Commission. Et l'élargissement des compétences européennes s'est ainsi accompagné d'un transfert progressif de ces compétences depuis la sphère démocratique, nationale, vers la sphère bureaucratique, européenne. Or la pression constante des lobbys conduit naturellement à une politique ultra-libérale puisqu'elle laisse libre cours à l'influence des plus puissants économiquement. L'opposition naturelle des citoyens à une politique dominée par les intérêts des grands capitaux n'a donc pas pu s'exprimer par un vote de sanction en faveur d'oppositions constructives à la politique européenne. Elle n'a pu s'exprimer qu'à travers une opposition bornée aux institutions européennes et à l'Europe, ce qui a renforcé considérablement les partis anti-européens et populistes, avec leurs recettes simplistes comme la sortie de l'UE, qui est d'ailleurs à l'ordre du jour en Angleterre, et probablement pas seulement...

Le réveil européen des vieux démons endormis:

Mais au delà de l'expression électorale, la colère de toutes ces victimes flouées par les promesses fallacieuses d'un avenir européen proclamé radieux par anticipation et puis privées de la possibilité de les sanctionner par un vote d'opposition constructif, ne peut qu'exiger des boucs émissaires et leur immolation (plus ou moins symbolisée), à défaut des capacités de réflexion requises pour identifier causes et responsabilités réelles dans le canevas bureaucratique, capacités de réflexion d'ailleurs trop engourdies par l'hypnose médiatique qui vise et réussit brillamment, de l'aveu même de ses animateurs, à transformer la communauté des citoyens en foule de consommateurs... Les fonctionnaires européens et leur service public pourraient bien constituer d'excellents boucs émissaires pour cette foule bornée qui est en train de se constituer. Et ils ne seront probablement pas les seuls, car une fois réveillés ses vieux démons destructeurs, une telle foule a naturellement tendance à adopter les mêmes victimes expiatoires emblématiques que par le passé... Déjà les premiers remous antisémites de masse éclaboussent aujourd'hui le navire européen. Il faut impérativement s'attaquer sérieusement à ses avaries, préalablement identifiées sans aucune complaisance, avant que le niveau de colère populaire ne dépasse trop la côte d'alerte déjà atteinte. Et cette tâche nous échoit à nous militants de la construction européenne, au premier chef. Car sinon, en cas de naufrage, en cas de rage, faute d'avoir usé assez tôt de l'arme de l'esprit critique, l'âpre critique des émeutes et des armes pourrait bien la remplacer. Et nous en porteront la responsabilité collective. En effet, il faut bien garder à l'esprit que la démocratie est certes lourde et coûteuse à assurer, qu'il est bien commode d'en présenter au peuple des ersatz, mais qu'à terme seule sa forme réelle est le moyen de substituer durablement la sanction électorale à l'émeute, justement!

L'élargissement au pas de charge:

Autre cause de courroux, autre déni de démocratie: le passage en force qui a été utilisé pour les élargissements successifs: il est proprement stupéfiant de les avoir conduit à marche forcée sans avoir recueilli démocratiquement l'approbation des peuples déjà membres! Et bien entendu cela n'aurait pas pu aboutir en donnant les mêmes droits et les mêmes devoirs à ceux qui tombaient de la dernière pluie d'Europe qu'à ceux qui descendaient de ses neiges d'antan! La raison voulait qu'on applique la méthode d'intégration des cercles concentriques ou plutôt des spirales concentriques, permettant d'élargir sans entraver, ne serait-ce que partiellement, l'approfondissement des liens des plus anciens assurant le leadership. Bien entendu cela aurait conféré aux anciens États Membres un avantage dans le choix des voies et du rythme d'intégration, du moins tant que les suivants n'auraient pas rejoint leur cercle au prix d'alignements exigeants. Mais pourquoi les anciens n'auraient-ils pas engrangé la moisson de leur primauté d'initiative? Au nom de quel principe les suiveurs, avec parmi eux des éléments notoirement rétifs, devraient imposer une direction et un rythme à ceux qui menaient jusque là la course en tête? De plus, une telle méthode concentrique aurait permis d'arrimer rapidement , ne serait-ce que symboliquement dans un premier temps, la Turquie a l'Europe (et l'Ukraine, ainsi que le Maroc, entre autres), en lui conférant seulement beaucoup moins de droits et de devoirs qu'aux pays justifiant de plus d'obligations à l'égard du cahier des charges de l'intégration. Mais au lieu de cela, tout en laissant Turquie, Ukraine et Maroc totalement hors du navire, on a choisi de violer le consentement des peuples déjà membres pour l'adhésion sans restrictions des nouveaux membres dont les migrations des citoyens sont d'ailleurs une des raisons majeures invoquée pour décider les anglais à sortir de l'Europe. Quel résultat brillant!

Nous avons jusqu'à présent examiné les vices de forme de la construction européenne, forme déjà fort dommageable à son avenir, mais le fond de l'affaire n'est malheureusement guère plus brillant!

Le sabordage du marché commun par abus idéologique du libre-échange:

Les pays d'Europe occidentale ont mis des siècles, souvent au prix de luttes sociales héroïques et de déchirements politiques, pour construire un marché intérieur basé sur l'existence d'une large classe moyenne bien rémunérée et instruite qui incarnait la substance et l'esprit de progrès industriels et sociaux sans comparaison sur la terre entière. Tel un défi de l'intelligence et de la civilisation à l'exaltation de la haine sociale érigée comme vertu, le développement d'un tel marché intérieur et d'une telle classe moyenne ont permis à l'occident d'échapper dans un premier temps, moyennant un protectionnisme qui limitait la concurrence internationale, grâce surtout à l'induction d'un progrès technique de productivité et au moteur de consommation et de relance qu'ils constituaient, à la fameuse malédiction marxiste de baisse tendancielle du taux de profit, aux révolutions qu'elle a suscité et aux régimes totalitaires qui les ont suivi. Ces progrès, et la démocratie induite qui s'est développée dans les pays occidentaux (peut-être d'ailleurs par peur de la montée en puissance des régimes marxistes), ont permis d'atténuer considérablement la brutalité de l'exploitation sauvage des classes défavorisées par les possédants. Cela s'est traduit par l'introduction progressive de coûteux droits sociaux, comme les congés payés, la sécurité sociale, les allocation familiales et autres bourses, les pensions de retraite et la gratuité de l'éducation, qui rapprochaient considérablement les classes laborieuses des conditions de vie de la classe moyenne et les mettait à l'abri des aléas de la vie tout en leur donnant accès à la culture et à la connaissance. Puis, après des siècles de haine et de guerres endémiques en Europe, le miracle de la construction européenne s'est produit, la dépassement des égoïsmes nationaux et la mise en commun des marchés intérieurs ont fait tomber les frontières intérieures européennes occidentales et auraient pu et dû inspirer une approche généreuse et fructueuse d'un mondialisme humaniste. Pour cela une démarche pragmatique et progressive était indispensable pour lever très progressivement les barrières douanières en obtenant des contreparties sur le plan social et démocratique et en prenant garde de be pas affecter le marché intérieur qui était le véritable capital de l'Union.

Mais cette voie n'a pas été suivie et là s'arrête la magie de Noël pour la jeune Europe, quand la fée Carabosse, arrivée tardivement sous la forme des accords de libre-échange, impose à tout crin le libéralisme sous ses formes les plus intransigeantes... Quand les généraux félons de notre économie expédient ses braves trouffions, les travailleurs, sur le chemin des dames de la précarité... Bons courage les ptits gars! Les ptits gaz oui... Il faut dire que le développement des acquis sociaux atténuait un peu trop la séparation des classes sociales aux yeux des possédants, qui voyait donc leur pouvoir menacé et leur part des revenus diminuer. Il leur fallait réagir et ce fut l'objet de la théorie économique néo-libérale du choc ~choc pétrolier choc terroriste choc économique choc guerrier choc épidémique choc des civilisations: tout es bon pour faire peur, pour saisir le clampin et lui faire avaler la saignée, bonne médecine ultra-libérale~ dont les effets ne manquèrent pas de se faire sentir jusqu'en Europe. Paradoxalement, celui qui a gravé ces recettes dans notre chair sous forme de traités, le signataire européen des accords du GATT et de l'OMC, n'est autre que Pascal Lamy, un social-démocrate bon teint proche de François Hollande, rapidement récompensé en 2005 par le poste de Directeur Général de l'OMC qui lui permit de mettre en pratique les accords dont il avait scellé notre destin. La proximité de Lamy et d'Hollande éclairerait, s'il en était besoin, la marche triomphale de cette tendance crypto-libérale de la social-démocratie française, qui tout en assurant la main sur le cœur vouloir tout faire pour préserver les acquis sociaux et combattre le pouvoir financier international, impose machiavéliquement un cadre international qui implique mécaniquement la destruction de tous nos acquis et la suprématie absolue de ce même pouvoir financier. Elle bénéficie de ce fait des soutiens ingénus, mais pas toujours explicites, de certains mouvements sociaux revendicatifs qui apprécient les prises de positions publiques purement formelles en leur faveur et les prébendes dont l'establishment les gratifient, et des pouvoirs financiers qui savent très bien quelles sont les funestes conséquences du libre-échange pour le monde du travail, et les bénéfices qu'ils peuvent en tirer. Ce double soutien garantit au courant crypto-libéral une bonne part du pouvoir politique. L'explosion des profits vis à vis des salaires, les conditions magnifiques offertes au "CEOs" en sont les résultats les plus positifs, pour les "happy fews" du moins... Car pour la grande majorité des autres, c'est l'inverse qui se produit, c'est le dumping social, ce sont les licenciements, l'endettement, les impôts confiscatoires, le chômage, la suppression progressive de tous les avantages sociaux, etc.... Et tout cela au nom de la concurrence avec des pays sans commune mesure avec l'Europe en matière de droits et d'avantages sociaux, très inférieurs en la matière et qui de plus disposent d'une réserve quasi-illimitée de travailleurs potentiels conservés bien au frais dans la misère, ce qui exclut de pouvoir atteindre un rééquilibrage dans le futur prévisible, avant que l'Europe ne soit mise à terre.

Il est remarquable que le suicide socio-économique européen consistant à ouvrir soudainement et tout grand nos portes aux produits industriels des pays dits "émergents" soit accueilli par des acclamations non seulement par les patronats trop contents de pouvoir investir dans des pays ou le coût de la main-d'œuvre est ridiculement faible ou importer des produits à bas prix, mais aussi par les tiers-mondistes patentés pour célébrer la revanche des pauvres peuples exploités contre les infâmes occidentaux enfin précipités aux enfers pour expier leur péché originel de réussite. Quelle revanche en effet: nous serons tous grillés à petit feu au même brasier de misère!

Il faut dire que les dégâts économiques de ce big bang libre-échangiste symbolisé par la création de l'OMC ont été occultés pendant un dizaine d'années par l'endettement vertigineux contracté dans cette période, endettement qui remplaça partiellement les revenus en chute libre pour les ménages et pour les États européens. D'où la formidable incitation de tous les rouages de libéralisme pour pousser ménages, entreprises et États à s'endetter toujours davantage depuis les années 90. Et une fois l'endettement dressé il emporte sans rémission toute velléité de redressement... À noter que le replacement des revenus par des dettes n'était pas le mobile subjectif des divers agents de cette gigantesque prestidigitation, mais c'était leur fonction objective, telle que créée par le besoin général de liquidités et la chute des recettes. Le besoin général crée la fonction sociale globale, et la fonction crée (ou utilise) les organes sociaux dont les mobiles subjectifs pour agir peuvent n'avoir rien à voir avec la fonction ni avec le besoin. En l'occurrence cette fonction d'endettement était purement dilatoire, car bien entendu cette démarche ne pouvait se traduire, après quelques années, que par des cessation de paiement ou faillites des États, des entreprises et des ménages concernés... D'où la crise des "subprimes" et celle des PIIGS, sans parler du niveau d'endettement effrayant des entreprises européennes ni des autres États européens. Le cas des USA était légèrement différent, dans la mesure ou par voie d'escroquerie par titrisation, ils réussirent à faire payer à l'épargne européenne une bonne part de la dette de leurs ménages, et que de plus chez eux l'usage de la planche à billet tient en partie lieu d'endettement de l'Etat... Leur situation n'est donc pas aussi grave d'autant plus qu'ils pratiquent un protectionnisme dissimulé et que leur degré de civilisation sociale laisse pour le moins à désirer. D'ailleurs, en général tous les pays trichent sur la base de standards arbitraires de façon à éviter de laisser la concurrence détruire leur industrie jusqu'au cœur de leur marché intérieur. Il n'y a que l'Europe qui, au nom d'une idéologie absurde dont nos dirigeants européens sont devenus les véritables hérauts, impose à ses États Membres de pratiquer béatement et en toute honnêteté naïve la gymnastique suicidaire du libre-échange à outrance! Il faut croire qu'en l'absence de service pan-européen de contre-espionnage (pardon de contre-intelligence) et compte tenu de la fragmentation nationale (c'est un euphémisme) de ce type de services en Europe, l'infiltration facile permet probablement aux agents d'influence extra-européens d'y atteindre des niveaux très élevés qui rendent redoutablement efficace leur travail de sape...

Le corset disciplinaire de la monnaie unique:

Un autre facteur est venu précipiter la chute d'une Europe triomphale dont nul, parmi les États membres hypocrites, ne voulait au fond: l'utopie de la monnaie unique pour des pays très disparates économiquement et sans transfert massif de liquidités des pays européens riches vers les pays européens moins performants en matière de croissance. Mais à-t-on jamais vu des seigneurs féodaux s'unir spontanément pour se soumettre à une monarchie dotée d'une réelle souveraineté?

Dans un pays digne de ce nom, l'impératif catégorique de cohésion nationale impose que les régions riches redistribuent massivement leurs revenus pour maintenir les modes de vie des régions pauvres suffisamment proches du leur pour éviter des exodes systématiques avec désertification humaine des zones pauvres. De plus les lois sociales et économiques sont très proches d'une région à l'autre au sein d'un même pays. Mais bien sûr la redistribution économique intra-européenne est proportionnellement sans commune mesure, bien inférieure à celle rencontrée à l'intérieur d'un pays. Il suffit de considérer les budgets européens et nationaux pour s'en assurer. Et chacun connaît la disparité saisissante de prélèvements obligatoires et de droits sociaux en Europe... Or ces deux éléments, redistribution massive et cohérence des prélèvements et droits sociaux, sont une condition sine qua non de la viabilité d'une monnaie unique, et certainement pas sa conséquence. En d'autres termes, n'en déplaise à nos démiurges économiques, on ne peut pas mettre la charrue avant les bœufs! En l'absence d'une monnaie unique, c'est à dire en présence de monnaies distinctes, les pays qui progressent le plus en productivité voient les capitaux d'investissement affluer et la demande de leur monnaie augmenter, ce qui fait qu'elle s'enchérit vis à vis des pays devenant relativement moins performants, dont la monnaie se déprécie symétriquement. Par conséquent, les habitants des pays devenant plus performants deviennent plus riches rien que par le seul enchérissement de leur monnaie, et les autre plus pauvres rien que par dépréciation de leur monnaie. Mais du fait de cette dévaluation naturelle des pays plus pauvres, leurs économies de pays devenant relativement moins performants gagnent en compétitivité monétaire, ce qui permet d'éviter la destruction pure et simple de leur tissu économique. Ils s'appauvrissent relativement mais survivent économiquement. En l'absence de ce mécanisme d'ajustement monétaire (ce qui est le cas quand plusieurs pays ont la même monnaie comme en Europe), les pays devenant relativement plus performants, comme l'Allemagne, conservent une compétitivité monétaire qui maintient leur travailleurs à un niveau de richesse inférieur à ce à quoi ils pourraient prétendre, ce qui fait qu'ils sont privés des fruits de leurs efficacité, et parallèlement le tissu économique des pays devenant moins performant est purement et simplement détruit par la concurrence non compensée par une dévaluation assortie. Bien sûr on pourrait compenser cette funeste tendance par des redistributions massive de revenus à travers l'Europe, mais une telle redistribution est incompatible, non seulement avec les dogmes libéraux de nos élites, mais surtout avec la faiblesse budgétaire européenne au regard des budgets nationaux, et avec la fragilité politique qu'illustre la pusillanimité des dirigeants de l'UE vis à vis des marchés, due à leur insuffisante légitimité puisqu'elle repose non pas sur des élections-sanctions avec un véritable enjeu majorité-opposition mais sur des traités alambiqués assortis de consensus ou de compromis internationaux boiteux. Donc pas de compensation, et en lieu et place l'écroulement des économies évoluant défavorablement... C'est le jeu de massacre auquel nous assistons depuis l'avènement de l'Euro et qui continuera jusqu'à son naufrage, atténué seulement par les prêts chimériques, sans espoir de retour et donc à fonds perdus, consentis par la communauté aux pays évoluant défavorablement... Avec quel espoir? Que les grecs se mettent miraculeusement à fonctionner comme des allemands? Autant espérer que tous les allemands adopte le Sirtaki comme pas de danse national...

Compte tenu du droit à la libre circulation des travailleurs instituée en Europe, le jeu de massacre de désertification décrit plus haut induit des mouvements de migrations massifs au sein de l'union, mouvements qui a leur tour alimentent les sentiments xénophobes cultivés par les partis populistes et sur lesquels ils prospèrent.

Là encore, tous comptes faits, le désastre est causé par une utopie, celle suivant laquelle on pourrait adopter une monnaie unique sans disposer des attributs essentiels propres aux États dûment constitués, à savoir un haut niveau d'intégration politique, économique et social. En s'imaginant à tort que la monnaie unique pourrait les induire, on met, répétons haut et fort, la charrue avant les bœufs et la caravane ne peut plus passer, que les chiens serviles aboient ou non... Les loups quant à eux, se contentent de hurler, dans un premier temps du moins...

Un pronostic bien sombre:

Les avaries du navire Europe sont donc sérieuses. Il s'agit même de véritables trous dans la coque, en particulier en ce qui concerne le fond, à savoir la politique de libre échange à outrance et l'Euro comme monnaie unique sans possibilité d'adaptation monétaire. Les sociaux-démocrates et la droite, pareils aux Dupont et Dupond, se chamaillent pour savoir s'il faut pousser les machines (position des sociaux-démocrates pour la relance) ou s'il faut réduire l'allure (position de la droite pour l'austérité) du navire. Quel belle alternative! La relance européenne profite aux pays émergents tandis que l'austérité mène l'Europe à la récession. Choisir une branche de l'alternative plutôt que l'autre influencera seulement l'endroit ou le bateau Europe coulera, sans changer beaucoup le moment ou cela se produira. Ce qu'il faut c'est colmater les brèches de la coque du navire Europe plutôt que d'accélérer ou de ralentir ses machines. Mais curieusement, nos élites ne veulent pas se salir les mains à ce colmatage... Le naufrage... est donc inévitable!

Pourtant des solutions existent:

L'enjeu réside précisément dans la capacité ou l'incapacité de l'esprit humain, quel que soit la forme d'organisation qu'il adopte, de reprendre les manettes de commande de notre propre développement, en les arrachant au golem sans âme, au marché, qui les a usurpé. Quand on mesure à l'aune de résultats calamiteux qu'on fait fausse route, droit sur les récifs, il faut avoir le courage de changer de cap et si nécessaire de faire marche arrière. C'est précisément le cas avec les accords excessifs de libre-échange. Il faut donc rétablir, avec mesure mais aussi avec détermination, des barrières douanières qui protègent les acquis sociaux européens contre la concurrence des pays très inférieurs en la matière. Il faut également refuser de construire l'Europe avec comme partenaires moteurs ceux qui refusent l'objectif d'une Europe des droits sociaux: c'est du sabotage par dumping social. De plus, pour les même raisons, si par un retournement de circonstance, malheureusement très improbable, nous réussissons à regrouper et à ranimer nos forces, il faudrait faire des progrès sociaux et démocratiques des pays émergeants une condition d'ouverture des marchés européens à leur concurrence.

Il en va de même pour l'Euro. Nous avons fait fausse route en imposant une monnaie unique sans imposer préalablement, ou au moins en même temps, les conditions qui la rendraient viable, à savoir un rapprochement considérable des conditions de vie, de travail et de taxation au sein de l'Europe. Si nous sommes incapables d'un tel rapprochement, il faut se replier sur l'Euro en tant que monnaie commune d'échange, tout en réintroduisant des variétés monétaires nationales de l'Euro (en quelques sortes des monnaies nationales, mais non utilisées pour vendre ni acheter). Ces variétés nationales seraient utilisées pour fixer coûts, prix et salaires dans les pays membres, mais pas pour payer (c'est l'Euro qui serait alors utilisé). Les variétés monétaires nationales seraient donc utilisées pour la comptabilité, et leurs fluctuations vis à vis de l'Euro (induisant une fluctuation différenciée des revenus et des coûts internes dans les États Membres) seraient le reflet indirect des marchés, pondérés par des décisions politiques de la banque centrale européenne, ce qui permettrait d'éviter les effets de spéculation. Ces fluctuations, qui affecteraient les salaires et les prix en Euros mais pas dans la variété monétaire nationale du pays considéré, permettraient aux travailleurs des pays en progrès relatifs de productivité de toucher les fruits de leurs efforts à travers le renchérissement de leur variété monétaire (dans laquelle prix et salaires seraient exprimés) vis à vis de l'Euro, et permettraient également aux pays en baisse de productivité d'éviter la liquidation de leurs tissus industriels et économiques par la dépréciation de leur variété monétaire nationale vis à vis de la monnaie commune, cette dépréciation jouant le rôle d'une dévaluation compétitive qui certes appauvrirait relativement leurs travailleurs, mais leur permettrait de poursuivre leur activité et donc de garder leurs gagne-pain.

Mais comme il est improbable de réussir!

Bien sur il faudrait imposer pour cela un mode de fonctionnement démocratique qui permettent aux peuples référendaires et/ou à leurs représentants du parlement européen, d'exercer un droit de sanction sur la commission qui serait donc poussée à développer une vraie orientation politique européenne, même si sa mise en œuvre devait dépendre de négociations de la commission avec les États membres, structurés en spirales concentriques par niveaux d'intégration avec des critères de transition clairs.

Il est clair qu'un tel mode et fonctionnement serait bien difficile à adopter à partir des institutions actuelles. Aussi pourrait-il s'avérer nécessaire de dénoncer les traités pervers qui nous ont conduit à la situation calamiteuse que nous connaissons aujourd'hui, et dans le même mouvement en réintroduire de nouveaux sur la base d'une approche principalement fédérale et de démocratique, qui ménage des degrés d'intégration différents et induise donc une flexibilité salutaire à la cohérence de l'ensemble. Une telle réforme ne peut être conduite que sous le leadership des pays du premier cercle, à savoir les pays capables et visant le plus haut niveau d'intégration. Les autres ne pouvant des lors que suivre a leur rythme, et même devant les suivre si comme c'est souhaitable l'unité du premier cercle est rendu obligatoire vis à vie des pays tiers.

Bien entendu certains trouveront ces propositions discriminatoire ou autres qualificatifs peu flatteurs, mais peu importe car si leur point de vue prévaut comme c'est malheureusement le cas, l'Europe sera inévitablement balayée par une vague populiste bornée et finira donc douloureusement dans des poubelles de l'histoire. Nous en goûtons déjà les premières effluves de goût écœurant, et ce n'est qu'une entrée en matière. On ne peut pas escompter d'indulgence de la part des peuples dont on s'est par trop payé la tête, au nom de sornettes idéologiques qui vont des principes libre-échangistes et/ou ultra-libéraux aux points de vue tiers-mondistes et/ou crispés sur l'avenir révolutionnaire radieux, la lutte et la haine de classes.

Pierre Loubières 25/03/2014

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Une politique de communication maladroite

Alors que l’on prévoit des élections européennes assez peu favorables à l’idée même de construction européenne, la Commission juge bon de mettre fin à Presseurop, le service de revue de presse qui avait pour objectif de faire partager l’information par tous les citoyens européens. Cette mort annoncée résulte d’ailleurs moins d’une volonté politique clairement affirmée que d’un pataquès administratif couplé à une ambition initiale maladroite (celle d’étendre ce service), vite abandonnée par crainte des critiques. Presseurop était pourtant un outil apprécié de tous et un moyen efficace de mutualiser l’information.

Par ailleurs, la Commission a vu fuiter un document dans lequel elle propose aux États-membres une politique de communication concernant les négociations commerciales transatlantiques. En ces temps d’économies budgétaires, le papier proposait d’être économique avec la vérité, en affirmant notamment que l’accord ne vise pas à atténuer les normes garantissant la sécurité et la santé des européens. Hélas ! Il semble que le commissaire Karel De Gucht n’ait pas bien lu ce document quand, devant les eurodéputés, il a fait part de ses craintes concernant les conséquences des négociations US/EU sur les protections sanitaires et environnementales définies par le règlement REACH.

Il est vrai que l’accord CETA entre l’UE et le Canada, signé le 18 octobre 2013 mais pas encore approuvé par le législateur européen, reste, lui, encore très confidentiel, sans doute parce qu’il contient des clauses exorbitantes comme l’interdiction de toute « violation des attentes légitimes des investisseurs », protégeant les investisseurs "de changement politique imprévisible". Bien sûr, cette clause figure au menu des négociations TTIP comme elle figure en bonne place dans l’accord ALENA.

Le papier fuité déclare vouloir répondre aux inquiétudes du public sur les conséquences des négociations US/UE sur le modèle social européen. Le moins que l’on puisse dire est que la Commission fait ce qu’il faut pour que ces inquiétudes se transforment en certitudes.

Une fois de plus, une fois de trop, à la veille d'élections européennes cruciales pour l'existence même de l"Union européenne, la Commission européenne ou plutôt - ce qui est totalement différent - la "Commission Barroso" a oublié que l'intégration européenne repose sur des valeurs et des principes partagés et non sur des choix idéologiques et partisans. Longtemps porteuse et garante de l'intérêt commun, cette Commission-là n'est plus que le porte-voix masqué d'intérêts particuliers, parfois même extérieurs à ceux des peuples européens... Que tous les Européens de coeur et de raison fassent en sorte que la "Commission Barroso" n'apparaisse un jour que comme un "accident de parcours" dans l'Histoire de l'intégration européenne comme dans celle de la Commission elle-même.

9 décembre 2013

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L'Europe trahie par ses dirigeants

Une autre politique de construction européenne est pourtant possible !

Les élections européennes approchent et les sondages sont inquiétants. Ils prévoient dans la plupart des pays une montée des extrêmes anti-européens et une abstention massive. Ils prévoient aussi que les électeurs voteront surtout en fonction d’enjeux nationaux, ce qui dénote la faible appropriation des enjeux européens par le corps électoral.

Par ailleurs, la plupart des partis qui se disent européens sont en réalité favorables à une approche intergouvernementale, qui petit à petit détricote la construction européenne. Sans compter ceux qui, profitant de la promesse de Cameron d’organiser un référendum de sortie de l’Union, veulent renégocier, à la baisse bien sûr, les compétences de l’UE.

Bref, les perspectives sont très sombres pour ceux qui croient que seule l’Europe peut donner les moyens au vieux continent de rester un acteur économique, politique et social significatif, ou peut permettre de reconquérir cette place.

Comment, en effet, convaincre l’électeur que l’approfondissement de la construction européenne est un enjeu majeur ?

Le bilan de l’UE n’est pas bon.
Déficit démocratique, finance folle, dette abyssale creusée par le soutien aux banques, politique économique destructrice du modèle social, pertes massives d’emplois, désindustrialisation et, à part quelques succès limités, incapacité à fonder un développement pérenne sur les nouvelles technologies, l’Europe apparaît désormais comme un club de pays en perdition, dirigé par des politiques frileux, passéistes et incompétents.

Les perspectives ne sont pas bonnes.
Tout ce que l’on propose à l’électeur, c’est la continuation des mêmes vieilles politiques qui ont échouées, les mesures dites d’assainissement qui aggravent en réalité les déficits tout en détruisant le tissu social. On n’envisage que les mêmes demi-mesures pour renforcer le gouvernement économique européen, annoncées par des conférences de presse triomphalistes mais sabotées dans leur application par les réticences des gouvernements nationaux.

Si l’on cherche un seul exemple de la nocivité des dirigeants européens, on le trouvera dans la récente déclaration de Mme Merkel déniant à l’électeur l’influence que le Traité de Lisbonne lui concède quant au choix du futur président de la Commission. Le déficit démocratique des institutions est voulu et entretenu par les gouvernements européens.

D’ailleurs, devant les sondages catastrophiques, les dirigeants européens sont dans le déni de réalité. Ils se consolent en considérant qu’un fort niveau d’abstention à des élections somme toute sans enjeu est normal et que le renforcement attendu du nombre de députés europhobes ne leur permettra cependant pas de peser dans le nouveau Parlement, puisque celui-ci fonctionne grâce à des coalitions de partis modérés. Les dirigeants européens affectent donc la sérénité devant le désaveu populaire.

L’Europe est bien utile comme bouc émissaire des décisions prises par les gouvernements nationaux. L’UE leur sert d’outil pour imposer des politiques désastreuses, hors de tout contrôle démocratique. Certains députés du Parlement européen sortant viennent de manifester – mais trop tard – leur inquiétude quant au fonctionnement des « troïkas » qui imposent des politiques dangereuses et inefficaces « fondées sur des hypothèses que les faits ont invalidées » d’après le Vert allemand Sven Giegold. L’influence des consultants privés, souvent américains, dans la détermination de la politique des troïkas, et accessoirement leurs tarifs exorbitants restent encore largement opaques.

La grande question qui agite les dirigeants est maintenant la négociation d’un traité de libre-échange avec les USA, que l’on prétend créateur d’emplois, mais dont l’objectif réel est de démanteler les réglementations qui protègent la santé, la sécurité des consommateurs et qui fixent des normes de qualités minimales pour les produits et les services. Une fois de plus, l’UE sera le paratonnerre qui protègera les dirigeants quand les effets économiques et sociaux néfastes d’une libéralisation sauvage de plus se manifesteront.

Par contre, les États membres se gardent bien de donner à l’UE les moyens d’une action au niveau européen. Le budget européen ne dispose que de maigres ressources autonomes car les États veulent garder les moyens d’empêcher toute initiative qu’ils ne contrôleraient pas. Les récentes décisions concernant la réduction du budget quinquennal ont torpillé tout espoir de relance économique et même tout renforcement réel (au-delà des effets d’annonce) des investissements pour préparer l’avenir économique, social et culturel de l’Union.

Est-ce cette Europe que nous voulons construire ?
Est-ce cette Europe qui permettra de protéger un modèle social déjà largement abîmé ?
Est-ce cette Europe qui correspond aux idéaux de paix, de prospérité et de justice sociale ?

L’électeur s’apprête, à bon escient, à sanctionner cette construction européenne dévoyée. Cette Europe est indéfendable.

Le malheur est que l’électeur, pour exprimer son rejet, n’a d’autre choix que de voter pour des partis anti-européens, opposés à la construction européenne pour de mauvaises raisons et par principe. Revenir aux États-nations et aux coopérations intergouvernementales branlantes ne ferait que précipiter l’irrémédiable déclin européen.

Il manque dans le paysage politique européen des partis réellement européens, capables d’expliquer les enjeux, capables de dessiner des perspectives et de proposer des politiques à l’échelon de l’Union.

Il faut proposer au citoyen européen une alternative positive, vers la construction d’une Europe qui soit réellement au service des peuples, pour créer de l’espoir et pour œuvrer à une prospérité bien répartie. Il faut donner une autre option que celle de voter encore une fois, soit pour ceux qui ont conduit l’UE vers l’échec, soit pour ceux qui veulent sa fin.

17/11/2013

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L’union européenne survivra-t-elle en 2024 ?

L’union européenne survivra-t-elle en 2024 ?

L’Europe était une belle idée. Un espace de paix et de réconciliation entre les belligérants, après une guerre particulièrement atroce. Une troisième voie entre les deux superpuissances qui se faisaient face lors de la guerre froide, alors même que les pays constitutifs de l’époque appartenaient au bloc occidental. Un espace de progrès social et de prospérité, grâce à un marché commun. Un havre accueillant des pays méditerranéens sortant de leurs dictatures d’inspiration fasciste, facilitant leur transition démocratique. Puis, un havre accueillant d’ex-pays du bloc soviétique dans le même but. Un espace de solidarité, aidant les régions appauvries à rattraper leur retard. Un mécanisme pour permettre la diffusion des valeurs fondamentales et pour harmoniser par le haut les droits sociaux, c'est-à-dire pour permettre à ceux qui n’en bénéficiaient pas encore de les acquérir.

La construction européenne s’inscrivait dans un contexte plus général de remise en cause des frontières, de limitation de souveraineté quand la paix était menacée (d’où la création du Conseil de Sécurité de l’ONU), de décolonisation et d’aide au développement du Tiers-Monde. Il s’agissait d’une utopie constructive, générant des progrès réels quoique partiels et fragiles.

Le succès de la construction européenne a généré ses propres obstacles. Avant même la crise actuelle, certaines régions ou certains pays riches ont commencé à se demander pourquoi poursuivre un effort de solidarité à long terme, d’autant plus que les adhésions nouvelles entraînaient des besoins considérables. L’oubli des erreurs passées et particulièrement des effets mortels d’un nationalisme effréné a permis à certains de se revendiquer souverainistes pour s’exonérer de l’obligation de négocier avec leurs partenaires et d’accepter des compromis.

La tentation du repli sur soi a été surtout renforcée par la mutation économique due à une politique mal maîtrisée, trop rapide, de mondialisation. Certains pays ont eu plus de difficultés que d’autres à remplacer les activités qui fuyaient vers les pays émergents par de nouveaux secteurs économiques et à dire vrai, quelques pays n’y sont pas parvenus. La migration des salariés vers des emplois non industriels n’a pas été facile, pour certains, elle a été impossible, malgré les efforts de formation professionnelle. De nombreux individus se sont retrouvés voués à un chômage définitif suivi d’une retraite difficile. Les promesses d’un espace de prospérité européen n’ont pu être tenues. Ni l’Union européenne ni les gouvernements nationaux n’ont su mettre en place une politique industrielle et de développement économique pour gérer les mutations, conséquence d’une politique de libéralisation des échanges qui, elle, a été menée tambour battant et même aveuglément, au seul profit de certains grands groupes industriels et bancaires.

La crise née du choc des subprimes (conséquence d’une politique de déréglementation activement menée par les gouvernements) a considérablement aggravé les choses. La nationalisation inconsidérée des pertes bancaires a entraîné une explosion de l’endettement des États, c'est-à-dire des contribuables. La crise bancaire a muté en crise financière, puis en crise économique. Il s’agit là d’un cataclysme d’autant plus affolant pour les citoyens que l’Union Européenne a étalé publiquement de sommet en sommet son impuissance et son incompétence. Chaque sommet européen donnait lieu à des communiqués annonçant des solutions, pour être suivi d’une rapide aggravation des choses rendant nécessaire un autre sommet. Les solutions trouvées devenaient de plus en plus dures pour les citoyens de certains pays, organisant leur spoliation par une pression fiscale exorbitante, par la diminution des retraites, par la disparition des emplois et récemment, la ponction de leurs dépôts bancaires. Les citoyens des pays épargnés, jusqu’à présent, n’en sont guère rassurés car on voit bien que la menace peut très rapidement s’étendre à d’autres pays. Le modèle social européen est gravement menacé. Même dans les pays riches, l’ordre du jour est à l’austérité durable. Par ailleurs, l’Allemagne, qui joue les premiers de la classe, commence à s’inquiéter des conséquences possibles de son impopularité auprès des autres peuples.

A l’incompétence s’ajoute l’illégitimité. La Troïka en est le symbole. Un concept mystérieux avec un nom fleurant bon le despotisme soviétique, des technocrates non élus aux commandes, des mesures impopulaires, le mépris des institutions démocratiques mises sous tutelle, la recette est presque parfaite. L’Union Européenne, avec ses institutions complexes ne respectant pas les principes de séparation des pouvoirs et de responsabilité de l’exécutif devant une chambre basse, son Conseil qui prend des décisions gravissimes sans contrôle ni recours effectif, n’a aucune des caractéristiques démocratiques qui rendent le pouvoir politique acceptable par les citoyens.

La charge est-elle injuste ? Après tout, le procès en incompétence doit être nuancé par le fait que l’Euro a été sauvé. Le procès en illégitimité n’occulte-t-il pas le fait que ce sont des gouvernements démocratiques qui siègent à Bruxelles ?
La vérité est que le citoyen juge l’arbre à son fruit. L’Euro a été sauvé, mais à quel prix et pour combien de temps ? Et pour quelles perspectives de reprise économique ?
Des décisions sont prises à Bruxelles, mais qui les prend, et comment ? Il n’y a aucun compte-rendu des sommets européens, les motivations des décisions et les positions des uns et des autres restent secrètes, à peine retracées par des déclarations officielles alambiquées ou par des articles journalistiques rédigés par des correspondants tenus soigneusement à l’écart des débats.

L’Union européenne apparaît d’autant plus comme un monstre ingouvernable et insensible à la volonté populaire que dans les pays qui la constituent, le citoyen peut bien voter comme il lui plait, à gauche ou à droite, ça ne change rien à la course du bateau.

Il n’est donc pas étonnant que ce déficit politique crée de l’euroscepticisme. Les institutions qui n’ont pas de valeur ajoutée réelle, visible pour leurs citoyens sont condamnées à disparaître. Certes, les experts expliqueront que seule l’Europe a la taille critique pour interagir avec les grands blocs économiques d’une économie mondialisée. Mais ce discours est inaudible, d’une part parce que de petits États s’en sortent très bien économiquement et d’autre part parce que l’Union européenne a effectivement failli dans sa mission de protection d’un espace commun de prospérité.

La désaffection des citoyens pour la construction européenne est un mouvement de fond, puissant et difficilement réversible. Déjà, le Royaume-Uni, si un référendum était effectivement organisé comme promis par son gouvernement actuel, choisirait selon toute vraisemblance d’arrêter là les frais. Mais dans tous les autres pays, des mouvements eurosceptiques existent, dont certains ont le vent en poupe et qui risquent bien de contribuer à forger une opinion majoritairement négative quant à la poursuite de la construction européenne.

Alors, l’Union Européenne survivra-t-elle en 2024 ? Si les tendances actuelles se poursuivent, rien n’est moins sûr. Depuis longtemps, les gouvernements nationaux s’ingénient à peupler les institutions européennes d’ectoplasmes aux postes dirigeants, ils foulent aux pieds les processus de décision communautaires et les maigres droits du Parlement, ils renationalisent les compétences ou les dupliquent, sans souci de la gabegie budgétaire. Ils favorisent la corruption locale grâce aux détournements de fonds, rendus possible par des procédures intentionnellement complexes, en se moquant, année après année, des rapports de la Cour des Comptes. Déjà, l’UE n’est qu’un théâtre d’ombres, fort commode pour faire porter le chapeau des décisions gouvernementales par une structure qui n’est en définitive qu’une marionnette. Ils ont tué le rêve européen.

Et pourtant, jamais une vraie union européenne n’a été plus indispensable. Aucun des grands problèmes qui affectent l’Europe ne peut trouver de vraie solution qui ne soit commune. Seule une voix commune européenne peut vraiment peser dans le concert mondial. La démonstration a contrario en est fournie par le simple fait que quoi qu’ils en aient, les gouvernements de l’UE se coordonnent en permanence et que leurs dirigeants se rencontrent intensivement. Ils sont très conscients que le retour aux Etats-nation en Europe signifierait l’accélération d’un déclin, peut-être confortable d’abord, mais rapidement destructif des valeurs, des richesses et même des identités des nations européennes.

Peut-on renverser la tendance ?

Il faut que l’union européenne retrouve sa pertinence vis-à-vis des citoyens. Cette pertinence ne peut résulter que d’un projet politique européen. Non pas avec des grands mots et des grands sentiments, auxquels plus personne ne croit. Un projet politique européen doit proposer des réponses concrètes aux grands défis communs : déficit d’emplois, financement des retraites et de la protection sociale, éducation, gouvernance économique et financière… Ce projet politique doit être crédible, c'est-à-dire soutenu par un budget et une structure capable de le mettre en œuvre au contraire des pitoyables ‘stratégie de Lisbonne’ ou ‘Europe 2020’.

La structure de gouvernance de l’UE doit devenir une structure démocratique, c'est-à-dire se conformer aux principes constitutionnels suivis au niveau national des États membres. Le principe un homme, une voix doit être respecté au niveau de la chambre basse, c'est-à-dire que chaque parlementaire doit être élu par un nombre sensiblement égal de citoyens. Une chambre haute peut représenter les États. Le pouvoir exécutif doit être séparé du législatif, mais responsable devant la chambre basse. Un mécanisme de contrôle constitutionnel doit permettre la sauvegarde des compétences respectives de l’Union et des États membres. L’Union doit avoir son budget propre et ses propres ressources. Cette simplification démocratique est la condition nécessaire pour que l’électeur puisse comprendre les enjeux et réellement peser par son vote sur la politique choisie.

Cette refondation est nécessaire pour que l’UE survive en 2024. Une étape importante en 2014 permettra de comprendre si cette survie est possible : les élections européennes. Aura-t-on lors de ces élections l’absence de débat habituelle sur les enjeux européens au profit des enjeux purement nationaux ? Si oui, l’UE ne vivra pas en 2024. Aura-t-on un rassemblement des partis politiques en groupements européens, selon leur tendance politique, pour présenter un programme réellement européen et proposer une équipe qui formera la future Commission européenne en cas de succès électoral ? Si non, l’UE ne vivra pas en 2024. Parlera-t-on lors de ces élections des leçons des crises et de la refondation d’une UE dotée des compétences, des structures et du budget nécessaire pour la définition d’un vrai programme politique européen ? Si non, l’UE ne vivra pas en 2024. Les familles européennes des partis politiques proposeront-elles un programme européen concret pour trouver une réponse aux grands problèmes du jour ? Si non, l’UE ne vivra pas en 2024.

Il reste peu de temps d’ici aux élections européennes de 2014. Si ceux qui croient encore qu’une Europe politique est indispensable pour préserver notre modèle de société ne s’organisent pas au niveau européen, ne présentent pas leurs solutions aux électeurs, s’ils laissent les choses aller à vau l’eau, alors l’UE a toutes les chances de disparaître d’ici 2024.

Will the European Union still exist in 2024?

Europe was a beautiful idea. It was to be a space for peace and reconciliation between the combatants after a particularly brutal war; a third way between the superpowers who were squaring up to each other in the Cold War, even while the founder countries belonged to the western bloc; a space for social progress and prosperity, thanks to a common market; a welcoming haven for the Mediterranean countries emerging from the fascist-leaning dictatorships, easing their way to democracy; and then a welcoming haven for the former members of the Soviet bloc for the same reason; a space for solidarity, helping the impoverished regions to catch up; a mechanism to stimulate the sharing of fundamental values and for harmonising social rights on a higher level, in other words to ensure that those who had never enjoyed such rights would acquire them.

European integration was to take place in a wider context of relaxing borders, limiting sovereignty when peace was threatened (hence the creation of a UN Security Council), of decolonisation and development aid to the Third World. It was to be a constructive utopia, generating real progress, albeit partial and fragile.

The success of European integration has created its own obstacles. Even before the current crisis, some regions or wealthier nations had begun to wonder why they needed to continue working towards such long-term solidarity, especially as new members were burdened by serious needs. Oblivious of past mistakes and particularly of the lethal effects of unrestrained nationalism, some nations claimed the right to stand above it, thus freeing themselves of the obligation to negotiate with their partners and to accept compromise.

The temptation to turn in on themselves was especially buttressed by the economic transformations brought about by poorly understood and over-rapid globalisation. Some nations experienced greater difficulties than others in substituting their former activities which had fled to the emerging economies with new economic sectors, and the fact is that some countries have simply failed to do so. The transfer of skills to non-industrial jobs was not easy for many workers, and for some was simply impossible, despite occupational training schemes. Many found themselves doomed to long-term unemployment leading into difficult retirement. Neither the European Union nor the national governments had any idea how to set up an industrial and economic development policy capable of managing the changes which were the outcome of trade liberalisation policies which had triumphantly and even blindly marched in, only to profit a handful of huge industrial and banking organisations.

The crisis born of the sub-prime mortgage shock (the outcome of a deregulation policy actively implemented by governments) made things much worse. The thoughtless nationalisation of banking losses led to an explosion of national debt, or in other words, of taxpayer debt. The banking crisis morphed into a financial crisis, then into an economic crisis. This was a cataclysm that was all the more terrifying for Europe’s citizens as the Union publicly spotlighted its impotence and incompetence at summit after summit. Each European summit produced statements announcing solutions which were speedily followed by a further deterioration in the situation leading to yet another summit. The solutions adopted became more and more painful for the people of some countries, which attempted to cope with their bankruptcies by exorbitant fiscal pressure, slashing retirement pensions, axing jobs and recently raiding the people’s actual bank accounts. Nor are the citizens of the countries spared in any way comforted, because it is all too clear that the threat can swiftly spread to other nations. The European social model is under serious threat. Even in the wealthy countries the order of the day is sustainable austerity. And now Germany herself, so far the top of the class, has begun to worry about the potential consequences of her unpopularity among the other countries.

Incompetence is twinned with illegality. The Troika is a symbol this. A mysterious concept whose name hints at Soviet despotism, consisting of technocrats with no peoples’ mandate to command, unpopular measures, scorn for the democratic Institutions they are supposed to protect, the recipe is almost perfect. The European Union, with its complex Institutions which ignore the separation of powers and the answerability of the executive to a lower Chamber, its Council taking the most serious of decisions unmonitored and beyond appeal, has none of the democratic characteristics which render political power acceptable to the citizen.

Is this accusation unfair? After all, it must be admitted that incompetent action notwithstanding, the Euro has been saved. Does the illegitimacy of what has happened cloak the fact that the governments sitting in Brussels are themselves democratic?
The proof of the pudding is in the eating. The Euro has been saved, but at what cost, and for how long? And what prospects of economic recovery has it left us with?
Decisions are taken in Brussels, but who takes them, and how? No minutes are taken of European summits, the reasons why decisions are taken, the positions adopted by this party or that remain secret, barely hinted at by tortuous official statements or by press articles drafted by correspondents carefully kept at arm’s length from the discussions.

The European Union seems all the more like an untameable monster, indifferent to the people’s wishes because in the countries which comprise that Union, citizens can vote as they please, left or right, and it has absolutely zero impact on the course being followed by the Union.

It is hardly surprising that such a political vacuum creates Euroscepticism. Institutions which have no real added value which the people can see with their own eyes are doomed. Experts will, of course, explain that only Europe has the critical size needed to interact with the large economic blocs which occupy a globalised world. But nobody pays any attention, because in the first place there is no shortage of small states which display a highly satisfactory economic performance, and in the second, the European Union has utterly failed in its mission to defend an area of shared prosperity.

The disillusionment expressed by the people regarding the integration of Europe reveals a movement which is thoroughgoing and powerful, and it will be very hard to turn it around. We have already reached a stage where all appearances suggest that if a referendum were held today in the United Kingdom, as the present government has promised, it would choose to stop spending right now. And indeed, Eurosceptic movements exist in all the other countries, some of which are gathering considerable momentum and are in a position to be able to help forge a negative majority opinion as to the pursuit of European integration.

So will the European Union still exist in 2024? If current trends continue, nothing could be less certain. For a long time now, the national governments have nominated boneless figures at the helm of European Institutions, have been riding roughshod over Community decision-making processes and the feeble powers of the Parliament, taking powers back or duplicating them, indifferent to the ensuing budgetary waste. They encourage local corruption by the misappropriation of funds, made possible by deliberately complex procedures, thumbing their noses, year after year, at the reports issued by the Court of Auditors. The EU has already become little more than a shadow-play, a structure which is little more than a puppet which can conveniently take the blame for decisions taken by national governments. They have murdered the European dream.

And yet a genuine European Union has never been more essential. No solutions exist for any of the grave problems which bedevil Europe which are not common to all. Only a single unified European voice can really carry any weight in the global discussion. The a contrario demonstration of this is provided by the simple fact that although they may have this voice, the EU governments never stop coordinating with one another, their managers never cease meeting. They are very aware of the fact that a return to the nation states in Europe would mean that decline would accelerate, that although it might seem comfortable at first, it would swiftly lead to the destruction of values, wealth and even the identities of the nations of Europe.

Is it possible to reverse the trend?

The European Union must rediscover its relevance to the citizens, and such relevance can only emerge from a European political project. This will not be achieved with fancy words and sententious expressions, in which nobody believes any more. A European political project must offer real solutions for the huge challenges which face us all: unemployment, retirement pensions and social protection, education, economic and financial governance, and so on. This political project must be credible, in other words it must be supported by a budget and a structure capable of putting it into effect, unlike the pathetic ‘Lisbon strategy’ or ‘Europe 2020’.

The structure of EU governance must become a democratic structure, a structure which complies with the constitutional principles followed at the national level in the Member States. The principle of one person, one vote, must be respected at the level of the Lower House, that is, each Member of Parliament must be elected by a roughly equal number of citizens. The Upper Chamber can represent the States. The executive power must be separate from the legislature, but must be answerable to the Lower Chamber. A constitutional monitoring mechanism must be in place so that the respective powers of the Union and the Member States can be protected. The Union must have its own budget and its own resources. This democratic simplification is the necessary condition for electors to be able to understand the issues and genuinely use their votes to press for the policies they have chosen.

For the EU to survive until 2024, the foundations will have to be rebuilt. An important step in 2014 will make it possible for us to understand whether survival is possible: the European elections. Will these elections witness the absence of usual debate on European issues to the profit of purely national issues? If the answer is yes, the EU will be dead in 2024. Shall we see the organisation of political parties as European groups with shared political tendencies, presenting a genuinely European programme and putting forward a team which will form the future European Commission if elected? If the answer here is no, the EU will be dead in 2024. Will these elections hear of the lessons learned from the crises and the re-establishment of an EU equipped with the powers, structures and budget needed to frame a genuine European political agenda? Again, if the answer is no, the EU will be dead in 2024. Will the European families of political parties be proposing a genuine European programme crafted to provide a response to the major issues which beset us today? If not, the EU will be dead in 2024.

The 2014 European elections are almost upon us. If those who still believe that a political Europe is essential to preserve our kind of society fail to organise at the European level, fail to present their solutions to the electors and let things fall apart, then there is every likelihood that between now and 2024 the EU will disappear.

17/07/2013

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L’Union européenne n’est pas une option, mais
une obligation

elle a besoin d’une fonction publique
compétente, indépendante et permanente.

English version

Nous personnel des Institutions européennes, sommes conscients que travailler auprès des Institutions européennes signifie participer à la réalisation d'un projet politique unique: la construction d'une Union qui rassemble aujourd’hui 27 états et plus de cinq cents millions de citoyens. Il y a à peine quelques décennies, avant le Traité de Rome, ces états s’entredéchiraient pour affirmer leur suprématie économique et culturelle.

Cette Union, qui se veut la plus grande révolution pacifique jamais vue au monde1, doit se fonder sur le multi-culturalisme. Toutes les cultures, et par conséquent, toutes les langues, ont la même dignité. Le multi-culturalisme étant une richesse et non une difficulté, il est reconnu comme tel dans le Traité de Lisbonne.

Toutefois, les interprétations du concept d’Union diffèrent très fortement selon les états membres. En simplifiant, certains n’y voient qu’une simple zone de libre échange alors que d’autres la conçoivent comme un projet qui devra aboutir à une vraie Union européenne avec un pouvoir décisionnel, de plus en plus représenté par le Parlement européen et avec de plus en plus de domaines de compétence.

Il est clair que le service public européen devra être modelé en fonction du choix politique qui sera fait. Une simple zone de libre échange ne nécessite pas une fonction publique compétente, indépendante et permanente. En revanche, dans une vraie Union européenne, cette fonction publique sera indispensable pour assurer l’intérêt général. Ceci est vrai aussi pour la “méthode communautaire2” , qui assure l’intérêt général de tous les états membres indépendamment de leur poids économique, et qui s’oppose à la méthode inter-gouvernementale, laquelle risque de privilégier les grands états membres et les puissants lobbies économiques.

Une première grande attaque du fonctionnement des institutions européennes est venue des partisans de la zone de libre échange et a été menée par le Vice-président de la Commission de l'époque, Neil Kinnock.

Ne pouvant pas déclarer s’opposer à la construction européenne, ceci étant politiquement incorrect, le VP Kinnock a prôné des réformes censées “améliorer” la transparence et l’efficacité des services et a tenté d’imposer une “culture unique”.

Il suffisait en effet, pour ralentir et enfin bloquer la construction européenne que le moteur de la construction, la Commission, ne fonctionne plus.

Et c’est ainsi qu’avec l’introduction de règles de gestion tellement lourdes, la Commission ne travaille presque plus que pour ses procédures internes. Seule une petite partie du personnel “produit” pour l’extérieur. Dans ces conditions, l’UE s’éloigne de plus en plus des besoins réels de ses citoyens.

L’autre grande “innovation” introduite par la réforme Kinnock est la mobilité obligatoire à tous les niveaux. Celle-ci a fragilisé la haute hiérarchie qui n’est plus compétente techniquement et n’assure plus que le management des services. Alors que dans le passé, le jeune fonctionnaire “faisait sa mobilité” et, en même temps, se formait. Ainsi au fur et mesure de son avancement dans la carrière il approfondissait ses compétences et diversifiait ses connaissances pour être prêt à assumer des responsabilités dans son secteur de compétence. De cette manière, la Commission disposait de personnel hautement qualifié. Aujourd’hui, on observe que la mobilité forcée des fonctionnaires, quel que soit leur grade, a très souvent conduit à la perte de la mémoire historique et a contribué à la démotivation au sein des services.

Mais des “innovations” plus démotivantes encore sont advenues : l’allongement de la carrière vers le bas et l’introduction d’une nouvelle figure de personnel (les agents contractuels, AC).

Tout d’abord, le nouveau grade de démarrage de la carrière, notamment pour les universitaires (AD5), n’est plus tellement attrayant pour les jeunes. Aux concours généraux, quelques nationalités sont désormais absentes. Le risque est que bientôt il n’y aura que certaines nationalités parmi les nouveaux recrutés.

De plus, l’autre grand problème est que la relève interne du haut management est quasi impossible pour les fonctionnaires recrutés au grade de base (AD5). Le jeune fonctionnaire entré en AD5 à 30 ans, devra, pour accéder à un poste du haut management (AD14, AD 15), bénéficier d’au moins 9 promotions. Il faut compter trois/quatre ans pour chaque promotion en moyenne, soit une bonne trentaine d’années ; il pourrait être prêt à assumer des responsabilités quand il aura 60 ans! De cette manière, le personnel “non cadre” serait donc recruté par concours ou sélection et la hiérarchie, par parachutage des capitales et des lobbies externes. Ceci sera la fin de l’indépendance de la fonction publique européenne. Et, dans cette situation, il est certain que les “grands” états membres pourront “se servir” et imposer leur “grands commis”.

Le contrat d’AC est une vraie discrimination et exploitation. Ces collègues font le même travail que les fonctionnaires, mais sont payés beaucoup moins et sont précaires (ne pouvant travailler que 3 ans dans les services de la Commission).

Contrairement aux attaques contre une fonction publique européenne qui serait trop chère, il faut savoir que les coûts administratifs pour cette fonction publique ne représentent que 5,7% du budget communautaire, dont seulement 2,6% concerne les salaires !!!

In fine, on découvre que la vraie motivation de ces réductions n’a pas été des améliorations budgétaires significatives, mais plutôt la volonté de décourager les candidats les plus performants d’entrer dans la fonction publique européenne et de “nationaliser” notamment la haute hiérarchie.

La réforme Kinnock a déjà permis des “économies” de 3 milliards d’euros à ce jour et fera économiser encore 5 milliards jusqu’à 2020. Mais elle a presque bloqué le fonctionnement de la Commission, empêchant ainsi cette Institution de jouer pleinement son rôle. La Commission devient de plus en plus le secrétariat des états membres, ou plus exactement, de certains états membres. La Commission est en train de perdre ainsi son rôle de proposition, et, donc, de moteur de la construction européenne.

Pourtant, dans un monde caractérisé par une mondialisation sauvage et par des crises financières sciemment non contrôlées, le seul moyen pour sauvegarder le modèle social européen est la réalisation d’une Union européenne démocratique et stable. Pour se faire, il faut que certaines conditions puissent se concrétiser:

- une participation active et consciente de ses citoyens;

- un travail dans l’intérêt général;

- une solidarité accrue.

Aujourd’hui, les citoyens européens, notamment les jeunes, prennent pour acquis tout ce qui a été réalisé après la signature du Traité de Rome, le 25 mars 1957. Et pour eux, l’Europe est vécue comme une contrainte et non comme une opportunité.

Comment en sommes-nous arrivés là? L’Union européenne a négligé sa relation avec ses citoyens.

L’Europe parle très souvent un langage incompréhensible pour le citoyen. Mais plus grave encore, les politiques nationaux se déchargent souvent de leurs responsabilités sur l’Europe, qui apparaît si lointaine à ses citoyens : “Bruxelles a décidé …”. Le citoyen ignore que les décisions finales sont prises par ses propres ministres et que “Bruxelles” ne peut que proposer!

Personne n’explique que beaucoup de progrès ont été réalisés grâce au fait que nos Etats membres ont décidé de travailler ensemble : l’Euro, Erasmus, la baisse des prix de certains services : vols aériens, télécommunications, la libre circulation des personnes, etc.

Et surtout, personne n’explique qu’une vraie Union européenne n’est pas une option, mais une obligation si nous voulons faire face aux défis actuels (mondialisation sauvage, crises financières incontrôlables, pour ne citer que les majeurs) sans perdre notre modèle de vie. Aucun état membre, petit ou grand soit-il , ne pourra faire face à ces défis tout seul!

Les citoyens doivent en être conscients et demander à leur représentants politiques d’oeuvrer pour réaliser le plus tôt possible une Union européenne forte, démocratique et stable. De leur côté, les Institutions européennes, notamment la Commission, doivent s’impliquer pour informer plus largement les citoyens des politiques et des actions conduites au niveau européen et leur faire connaître, de manière claire et accessible, les effets de ces actions sur leur vie quotidienne et sur leur avenir.

Trois principes commandent la voie vers une vraie Union européenne:

● L’équilibre institutionnel doit être respecté et le rôle du PE et de la Commission renforcé.

● La fonction publique doit continuer à être compétente, indépendante et permanente.

● La méthode communautaire doit être renouvelée et renforcée.

Si l’Union européenne n’est pas capable de se renforcer, les égoïsmes nationaux vont refaire surface et la modeste construction réalisée depuis le Traité de Rome risque de s’écrouler : il n’y aura pas de gagnants parmi les européens, nous seront tous des perdants.

Nous personnel des Institutions européennes nous sommes prêts à nous battre pour sauvegarder le modèle social et économique européen et ainsi faisant nos spécificités culturelles et l’avenir de notre société.

Franco Ianniello

1. Le Traité de Lisbonne dit dans son article premier :"L'Union est fondée sur les valeurs de respect de la dignité humaine, de liberté, de démocratie, d'égalité, de l'État de droit, ainsi que de respect des droits de l'homme, y compris des droits des personnes appartenant à des minorités. Ces valeurs sont communes aux États membres dans une société caractérisée par le pluralisme, la non-discrimination, la tolérance, la justice, la solidarité et l'égalité entre les femmes et les hommes”

2. AVIS du Comité économique et social européen “La rénovation de la méthode communautaire (lignes directrices)” Malosse-Dassis

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L'Europe de demain, un cauchemar annoncé ?

Par Claude Rolin, Secrétaire général de la CSC

L'Europe, c'est tout d'abord un formidable projet, celui de la construction d'un espace de paix et de développement économique et social. L'Europe c'est notre projet, notre rêve : permettre à tous les citoyens de vivre dans la paix et d'avoir de meilleures conditions de vie. Il faut pourtant constater que de moins en moins d'Européens jugent positive l'appartenance de leur pays à l'UE (1). Nous sentons nous aussi cette désillusion chez un grand nombre de nos affiliés, et tout porte à croire que ce ressenti va encore se dégrader dans les prochaines semaines...

Ce 11 mars, un sommet extraordinaire réunira les chefs d'Etat européens, suivi les 24 et 25 mars, par un important Conseil européen. Au menu de ces réunions : le fonds européen de stabilité, le pacte de compétitivité et les programmes nationaux de réforme. La volonté des dirigeants européens est de définir une gouvernance économique. Depuis longtemps, avec les autres syndicalistes européens, nous revendiquons une véritable gouvernance économique européenne car nous sommes convaincus qu'il n'est pas possible de maintenir une monnaie unique sans un projet coordonné de développement économique, social et environnemental. Il nous faut un projet qui donne de l'avenir aux Européens d'aujourd'hui et aux générations futures.

Nous devrions donc être heureux de voir nos responsables se pencher sur cette nouvelle gouvernance. Nous sommes au contraire extrêmement inquiets car les propositions annoncées sont aux antipodes de notre rêve pour l'Europe. C'est même un véritable cauchemar qui nous est annoncé ! C'est le coeur même du projet européen qui est en danger.

A la suite d'une des plus terribles crises que nos Etats aient jamais connues, il a fallu mobiliser d'importants moyens pour tenter de stabiliser l'économie. Les salariés ont été durement mis à contribution pour payer l'addition, subissant licenciements et chômage temporaire. Les Etats ont également été mis lourdement à contribution pour sauver les institutions financières, mais les joueurs du casino financier ont rapidement réorienté leurs activités en spéculant sur la capacité des Etats à assumer te poids de leur dette. Face à ces attaques, l'Europe a accordé certaines aides tout en imposant des mesures d'austérité particulièrement contraignantes.

La récente proposition franco-allemande d'un pacte de compétitivité est révélatrice de la nature de la gouvernance économique qui se met en place en Europe : les seules variables d'ajustement économique sont les politiques sociales et les salaires. On y met clairement en cause l'âge de la retraite et les systèmes d'indexation des salaires. La logique néolibérale est le fil conducteur de cette soi-disant croissance intelligente et durable.

La communication de la Commission européenne sur l'examen annuel de croissance ne laisse aucune place à l'ambiguïté. Dans ses dix priorités, elle attaque frontalement le modèle social européen. Elle prône l'assainissement budgétaire par la diminution des dépenses publiques liées aux transferts sociaux. Elle recommande une modération stricte des salaires, qui doit passer par la révision des clauses d'indexation inscrites dans les systèmes de négociation salariale.

D'autres recettes visent une plus grande libéralisation du secteur des services, la réforme des systèmes de retraites,.. Le contrat de travail lui-même est mis en cause quand la Commission va jusqu'à recommander de réduire la « surprotection » dont bénéficient les contrats à durée indéterminée.

Plusieurs propositions législatives pour renforcer la gouvernance économique devraient également être adoptées en juin, en codécision avec le Conseil Européen. Elles portent entre autres sur la prévention des écarts de compétitivité, l'idée étant d'instituer une sorte de « norme salariale » européenne dont le non respect serait passible de sanctions. On parle aussi de limiter très strictement les dépenses publiques pour maîtriser les déficits des Etats. Quel paradoxe ! Alors que la crise économique et financière a mis en avant toute l'importance du rôle des Etats, des services publics et de la sécurité sociale, ce projet européen de gouvernance économique prend le risque de casser les quelques signes de reprises en menant des politiques de récession.

L'Europe se trouve aujourd'hui devant une responsabilité historique. Elle doit apporter une réponse à la crise et mettre en place une gouvernance économique au bénéfice de tous les citoyens. Pour nous, syndicalistes, sortir de la crise/ c'est construire un développement durable, c'est donner la priorité à la création d'emplois, en renforçant les systèmes de protection sociale et en s'appuyant sur des services publics performants. Au lieu de vouloir flexibiliser le marché du travail, diminuer les salaires, augmenter l'âge de la retraite, il faut de toute urgence reconstruire un véritable projet positif qui propose aux travailleurs et aux allocataires sociaux un- avenir ouvert, enthousiasmant, qu'ils aient envie de construire. Comme syndicalistes, nous restons des militants de la construction européenne mais nous la voulons plus humaine et plus sociale. D'urgence, nous, avons besoin d'une autre Europe.

(1) Les sondages de l'Eurobaromètre indiquent qu'entre 2007et 2010, le pourcentage d'Européens qui jugent positive l'appartenance de leur pays à l'UE est passé 57 à 49 %.

10.03.2011

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La maturation de la démocratie européenne

Par Pia Locatelli, présidente de l'Internationale socialiste des femmes, ancienne parlementaire européenne (PSI) et Gianni Copetti, président de Iniziativa-europea.eu

Les politiques de Bruxelles sont largement perçues comme une menace contre le statut économique, professionnel et social. L'opinion s'en désintéresse faute d'apercevoir un moyen de les influencer. L'absentéisme croissant aux élections européennes est la manifestation de ce sentiment d'impuissance. Pourtant la préservation d'un modèle social où liberté, solidarité et progrès sont en équilibre ne peut venir que d'actions au niveau du continent.

Si l'Europe est la première puissance économique du globe, capable de générer assez de richesse pour pouvoir mener sa propre voie, il n'en va ainsi d'aucun de nos Etats. Les politiques actuelles ne paraissent pas en mesure de définir une alternative à la gestion de la société par les marchés qui est à l'origine de la crise. Il est temps de réclamer l'Europe sociale qui suppose la maturation de la démocratie européenne.

La politique sociale reste nationale malgré les objectifs de promotion de l'emploi, d'amélioration des conditions de vie et de travail et de protection sociale adéquate que l'Union européenne (UE) s'est donnée. Ces objectifs sont des vœux pieux dont la réalisation est confiée aux forces du marché. Pour les réaliser, l'Europe se limite à encourager la coopération par des études, à des avis et à l'organisation d'échanges de bonnes pratiques. Ces "mesurettes" ne peuvent conduire à l'harmonisation des systèmes de sécurité sociale, du droit syndical et des négociations collectives, ni des politiques de l'emploi, du droit du travail ou de la formation professionnelle.

En matière d'emploi, des analyses et échanges d'informations sont prévus sans harmonisation législative. La diversité des équilibres sociaux est empêchée d'évoluer vers plus de progrès au risque de leur refonte à la baisse au nom de rentabilité. Le traité d'UE stipule que l'harmonisation des droits des travailleurs requiert l'unanimité même si cette harmonisation est requise pour le fonctionnement du marché intérieur.

Les matières de la sécurité sociale, de la protection sociale, de résiliation du contrat de travail et des droits syndicaux restent privées de possibilités d'évolution politique par l'imposition de la règle exceptionnelle de l'unanimité. L'Europe ne peut se borner à considérer ses citoyens comme des consommateurs en leur faisant supporter comme travailleurs le poids de la rentabilité des investissements. En laissant le marché détruire nos conditions sociales au nom de la flexibilité, l'Europe se conforme au modèle anglo-saxon, sans voir que c'est lui qui nous a conduits dans l'impasse.

Les démocrates doivent avoir pour priorité que les objectifs sociaux de l'UE puissent être atteints par un vote à la majorité des Etats, avec une pleine implication du parlement européen et permettant aussi des coopérations renforcées.

Dans l'immédiat, mobilisons-nous pour que la Commission présente dans le cadre de l'élimination des distorsions de concurrence un agenda d'harmonisation des dispositions légales de nature sociale. Selon le traité la politique de concurrence comme tout autre politique de l'Union doit prendre en compte la garantie de la protection sociale. Même si la poursuite de cet objectif ne peut viser à l'harmonisation des systèmes de sécurité sociale, le renouvellement de l'agenda social du Conseil européen de Nice 2000 pourrait garantir l'équilibre entre flexibilité et sécurité de l'emploi et protection sociale sans attendre une révision du traité. Cet agenda pourrait être réalisé à la majorité qualifiée ou dans le cadre d'une coopération renforcée de la zone euro. Ce pourrait être la chance de stabiliser les conditions sociales au moment où elles ne sont pas encore trop défavorables.

La réalisation de l'Europe sociale suppose l'arrivée à maturité de la démocratie européenne. La démocratie représentative est le fondement de l'Union, il n'est pas nécessaire de faire revivre le spectre d'une constitution établie par-dessus la tête des gouvernements. Donnons à cette aspiration le nom de "fédération européenne des peuples" qui pourrait qualifier notre Union lorsqu'elle sera parvenue à la maturité démocratique. Le facteur initial en est l'approfondissement du rôle des partis politiques européens. Le traité d'UE constate que ceux-ci contribuent à la formation de la conscience politique et à l'expression de la volonté des citoyens de l'Union. Pourtant il ne s'agit que d'organismes de coordination, leur ambition reste limitée au plus petit dénominateur commun existant entre les partis nationaux.

Il faut organiser l'adhésion directe aux partis politiques européens, une telle évolution est un préalable pour que les élections européennes se focalisent autour de ces questions. La composition des listes pour les élections européennes doit aussi réunir des candidats issus de plusieurs Etats membres. Les partis politiques nationaux hésitent à ouvrir leurs rangs à des personnalités d'autres nationalités, pourtant la possibilité de voter pour des candidats majeurs simultanément dans plusieurs Etats membres donnera un visage européen à ces élections.

Des leaders pourront ainsi émerger, investis de la volonté populaire la plus large, avec une vocation à participer à l'exécutif européen, leur légitimité démocratique étant semblable à celle dont bénéficient les membres des gouvernements. Les partis pourront alors annoncer leur préférence pour diriger la Commission en cas de victoire, ce qui établira la Commission comme un authentique gouvernement de l'Europe. L'exécutif européen pourra ainsi être unifié en appelant le président de la Commission à présider aussi le Conseil européen.

Seule cette personnalité jouira en effet de la légitimité démocratique pour représenter l'Europe au plus haut niveau. Elle pourra aussi réaliser l'Europe sociale si c'est la volonté des citoyens de le faire.

10.03.2011

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Quand les grands pays européens s'entendent pour imposer leur loi aux petits

Par Guy Verhofstadt, président du groupe de l'Alliance des démocrates et des libéraux pour l'Europe au Parlement européen

Merkel. Monnet. Ces deux noms pourraient et devraient même être les deux faces d'une même médaille. Hélas, il n'en est rien, tant chacun incarne des visions différentes, voire contradictoires de la construction européenne. En fait, à bien des égards, soixante ans plus tard, on retrouve la même vision divergente qui opposait Jean Monnet à Charles de Gaulle. Angela Merkel, clone de Charles de Gaulle ? Un comble si l'on songe à ce que l'Allemagne doit à Jean Monnet et à la méthode communautaire qui lui a permis de devenir la puissance phare de l'Europe d'aujourd'hui. La chancelière veut-elle donner raison aux chauvinistes français qui se méfiaient des "revanchards" allemands ?

Considéré comme un des pères fondateurs de l'Europe moderne, Jean Monnet avait une intuition : pour réconcilier la France et l'Allemagne après la guerre, non seulement il fallait mettre en commun les principales ressources de l'époque, le charbon et l'acier, mais aussi élargir ce pacte à d'autres Etats européens, l'Italie et le Benelux, sur la base d'institutions communes permettant tant aux grands qu'aux petits pays d'être paritairement parties prenantes au mécanisme de prise de décisions.

Jean Monnet avait l'habitude de dire : "Nous ne coalisons pas des Etats, nous unissons des hommes." Et d'ajouter : "Rien n'est possible sans les hommes mais rien n'est durable sans les institutions." C'est l'invention de la "méthode communautaire".

Avec l'arrivée au pouvoir de Charles de Gaulle, la France a voulu imposer, au début des années 1960, une autre approche, la "méthode intergouvernementale", préconisée par le plan Fouchet (fondé sur la souveraineté des Etats), en 1962. En substance, les "grands" pays décident, les "petits" exécutent. Ces derniers, avec le soutien de l'Allemagne, ont mis ce plan à la poubelle et l'Europe s'est finalement construite grâce à la méthode communautaire, laquelle ne prive pas les chefs d'Etat et de gouvernement de leur rôle d'impulsion, mais permet de filtrer les débats à travers un exécutif indépendant des Etats membres et détenteur de l'intérêt général européen, la Commission européenne. Aujourd'hui cependant, on assiste à un nouvel assaut des "intergouvernementalistes", qui s'appuient sur le nouveau rôle institutionnel du Conseil européen.

Initiative de l'ancien président français, Valéry Giscard d'Estaing, et de l'ancien chancelier allemand, Helmut Schmidt, la création, dans les années 1970, du Conseil européen n'était pourtant qu'un accident de l'histoire, comme me l'a raconté lui-même ce dernier. L'idée n'était pas d'instaurer une nouvelle institution européenne mais de préparer un cadre informel permettant aux Européens de coordonner leurs positions sur les grandes questions internationales, à une époque où l'Union européenne (UE) n'avait aucune compétence en la matière.

Pour l'ex-chancelier, la menace des missiles SS20 soviétiques et la nécessité pour l'Europe de réagir collectivement à cette situation exigeait un tel cénacle. Du reste, pendant des années, le Conseil européen n'a rien changé à l'équilibre institutionnel européen ni à l'approche communautaire.

Cependant, le ver était dans le fruit. La France, qui a toujours eu un faible pour le concept d'Europe des nations, dans le droit-fil de la pensée gaulliste, n'a ainsi jamais cessé de promouvoir le Conseil européen, socle de la méthode intergouvernementale. Et l'Allemagne n'a longtemps jamais cessé de s'y opposer, privilégiant l'approche communautaire et devenant, de ce fait, l'alliée naturelle des "petits" pays européens.

Une approche qui s'est d'ailleurs révélée gagnante pour l'Allemagne, dont l'économie a profité, plus que beaucoup d'autres Etats membres, des progrès de la construction européenne. Depuis la réunification toutefois, la pensée allemande a lentement mais sûrement évolué et cette évolution a débouché sur l'institutionnalisation, grâce au traité de Lisbonne en 2007, du Conseil européen. De club privé et discret, le Conseil européen est devenu le syndicat officiel des chefs d'Etat et de gouvernement, avec son président permanent, lequel ne cesse d'empiéter sur les compétences de la Commission européenne, sans aucun contrôle démocratique du Parlement européen.

Baptisée "méthode de l'Union" par Angela Merkel, ce coup d'Etat institutionnel n'est jamais que la restauration de la vieille méthode intergouvernementale. Et si nous n'y prenons garde, l'Europe et la France ont tout à y perdre. L'Europe d'abord, qui fonctionne sur la base d'un contrat, reposant lui-même sur des disciplines et des politiques communes dont les contraintes sont acceptées par tous, car chacun participe à leur élaboration à travers le conseil des ministres et le Parlement européen où ils sont représentés au prorata de leur poids démographique respectif, le tout sous le contrôle d'une institution indépendante, la Commission européenne, qui veille au bon respect des règles tant par les "petits" que les "grands" pays.

Cette égalité n'existe plus, ou seulement fictivement, au sein du Conseil européen où les petits arrangements entre amis font office de procédure. Ainsi en est-il du pacte de stabilité, maintes fois violé avec la coupable complicité des chefs d'Etat et de gouvernement et ce malgré les rappels à l'ordre de la Commission. Combien de sous-marins, de chars et d'avions la France et l'Allemagne ont-elles vendus à la Grèce avant de s'inquiéter de l'endettement de la République hellénique, championne d'Europe des dépenses militaires ?

Faut-il acheter des centrales nucléaires françaises ou des machines-outils allemandes pour être à l'abri de sanctions pour mauvaise gestion des finances publiques ? C'est pour éviter cette dérive que la Commission européenne a proposé une réforme du pacte de stabilité, prévoyant un quasi-automatisme des sanctions. Le président stable du Conseil européen, sans oser contester l'objectif, préconise, pour sa part, que les chefs d'Etat et de gouvernement conservent le dernier mot. Autrement dit, un quasi-statu quo. En se ralliant à la "méthode de l'Union" à l'allemande, Nicolas Sarkozy trahit l'esprit de Monnet - ce qui est le moindre de ses soucis - avec le sentiment du devoir gaulliste accompli. Mais le président oublie que son pays n'est plus le même que dans les années 1960 où, fort de sa puissance économique et politique, il décidait de tout. Aujourd'hui, la puissance économique et politique de l'Europe, c'est l'Allemagne, et c'est elle qui impose son tempo et ses thèmes.

L'illustration la plus patente de cette nouvelle donne est le fameux pacte de compétitivité présenté par Angela Merkel et Nicolas Sarkozy lors du dernier Conseil européen. Un exercice surréaliste pour le président français si l'on songe que la mouture originale de ce texte a été conçue, écrite et diffusée d'abord à Berlin et en allemand. La contribution française s'est limitée à donner son accord. Car c'est ça le problème de la méthode intergouvernementale : tout le monde est égal, mais Angela Merkel est plus égale que Nicolas Sarkozy. Cela ne signifie nullement qu'il faille rejeter les idées contenues dans ce document, première ébauche concrète d'une véritable politique économique et de croissance européenne.

Mais si la France, comme d'autres, veut peser sur la définition de cette politique et sur les mécanismes de sa mise en oeuvre, il est temps de passer la main à la Commission européenne, garante de l'intérêt général européen et de troquer la "méthode de l'Union" pour la "méthode communautaire". Car confier les rênes de l'Europe à la seule Allemagne, c'est prendre le risque d'un douloureux réveil nationaliste chez ses voisins. Et ce regain nationaliste est bien la dernière chose dont l'Europe a besoin.

09.03.2011

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Conseil européen de mars 2011 : Pour une croissance solidaire en Europe

Lettre du 10 mars aux Présidents     Version IT    EN

M. le Président Van Rompuy, président du Conseil européen
M. le Président Buzek, président du Parlement européen
M. le Président Orban, président du Conseil de l'Union européenne
M. le Président Barroso, président de la Commission européenne

MM. les Présidents,

A la veille du Conseil européen, la majorité syndicale des Institutions européennes s'inquiète des orientations des mesures de gouvernance économique qui paraissent être sur la table.

Au nom de la lutte contre les déficits publics, ces mesures renforceraient une flexibilisation accrue du marché du travail, une réduction des investissements dans les infrastructures et les services publics et la remise en cause des mécanismes de solidarité. Elles ne peuvent tenir lieu de politique économique de l'Europe.

A l'opposé du déclin ainsi programmé des conditions sociales des populations, l'Europe doit assurer la stabilité économique et sociale de ses citoyens conformément aux valeurs de démocratie, de liberté économique et de progrès social qui sont au centre de la construction européenne et du Traité de Lisbonne.

La majorité syndicale appelle les Institutions européennes à rejeter un modèle économique et une vision de la société qui font peser le coût des ajustements de rentabilité des entreprises sur les seuls travailleurs et sur la réduction des services publics.

Les européens ne peuvent plus accepter les politiques suivies depuis vingt ans qui ont conduit à la désindustrialisation de l'Europe et à la mise à mal de son modèle social. Au contraire, c'est par davantage de solidarité que l'Europe retrouvera sa stabilité et sa croissance économique. Et par là même la confiance de ses citoyens.

A cette occasion la majorité syndicale des Institutions européennes salue l'initiative du Parlement européen en faveur d'une taxe sur les transactions financières qui permettrait une vraie relance des politiques structurelles en Europe.

Enfin, comme représentants du personnel, nous déplorons particulièrement les orientations présentées par la Commission allant dans le sens d'une précarisation accrue de l'emploi et de la baisse des revenus du travail.

Ces mesures paraissent en effet de nature à mettre également en péril les fonctions publiques, nécessaires acteurs de solidarité dans les États-membres, et en particulier la fonction publique européenne dont l'efficacité et l'indépendance garanties par le Traité de Lisbonne doivent pouvoir demeurer au service de l'intérêt commun européen.

signé

F. Ianniello (R&D)
A. Seller (SE)
D. Mormille (TAO/AFI)
S. Adriaens (S.F.I.E.)
R-P. Koch (CONF-SFE)
P-Ph. Bacri (FFPE)
H. Conefrey / G.Vlandas (RS/USHU/U4U)


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